Toujours sur le thème du mythe de la machine :
http://thearchdruidreport.blogspot.com/2012/02/recovery-of-human.html
Le mythe de la machine, le thème du post de la semaine dernière, a des implications qui vont bien au-delà des thèmes de discussion habituels sur la scène du pic pétrolier. Une de ces implications, dont j'ai parlé brièvement la semaine dernière, découle de la façon dont tant de gens qui sont préoccupés par le pic pétrolier se fixent obsessionnellement sur l'espoir qu'un certain type de machine va résoudre le problème.
Il y a au moins trois manières par lesquelles cette fixation va à l'encontre de toute réponse significative face à la fin de l'ère de l'énergie abondante et pas chère. La première, bien sûr, est que le pic pétrolier n'est pas un problème, parce que par définition un problème a au moins potentiellement une solution. Le pic pétrolier n'a pas de solution. C'est vrai dans le sens étroit du terme - aucun retournement de situation ne permettra
à la civilisation industrielle d'extraire une quantité illimité de pétrole brut d'une planète finie - et il devient de plus en plus clair que c'est tout aussi vrai dans le le sens large - aucune autre source d'énergie ne peut fournir quoi que ce soit d'approchant ce torrent d'énergie hautement concentrée et pas cher, que le pétrole a fourni à la société industrielle au cours du siècle dernier.
Le pic pétrolier est donc une situation plutôt qu'un problème, puisque rien de ce que nous ou quelqu'un d'autre peut faire ne le fera disparaître. Au lieu de cela, nous et nos descendants à travers les millénaires à venir devront vivre avec la réalité d'un monde beaucoup moins richement pourvu en sources d'énergie concentrée telle que celle héritée par nos ancêtres quelques siècles auparavant. La tâche qui nous attend, nous et nos descendants, c'est de trouver des réponses créatives et humaines à cette réalité implacable. Pour cette tâche stimulante et enrichissante, en retour, l'obsession actuelle avec ses fantasmes de salut par l'intermédiaire de machine n'offre aucune aide du tout. Bien au contraire, en détournant l'attention des ajustements qui devront être faits, cette obsession rend le travail qui nous attend plus difficile qu'il ne devrait l'être.
La seconde manière par laquelle cette obsession des machines est l'inverse d'une réponse utile à la situation difficile du pic pétrolier, c'est qu'elle repousse la responsabilité de faire quelque chose sur quelqu'un d'autre. Je doute sincèrement que l'un de mes lecteurs ait une influence réelle sur les décisions liées à la construction des éoliennes géantes, par exemple, ou le développement de réacteurs au thorium, ou sur la conversion d'une fraction substantielle du Nevada en une ferme géante d'algue
à biodiesel. Cela rend plus facile d'insister sur le fait que des mesures comme celles-ci sont la réponse appropriée à la venue du pic pétrolier, puisque les gens qui font cette promotion n'ont pas à aller jusqu'au bout de ces mesures, c'est le travail de quelqu'un d'autre.
Sans doute la facilite de cette approche a beaucoup à voir avec sa popularité, mais il y a un autre facteur impliqué. Une énorme quantité de rhétorique sur l'avenir de nos jours commence à partir de l'hypothèse que les modes de vie des classes moyennes dans les sociétés industrielles d'aujourd'hui sont normales, et devrait être disponible indéfiniment, du moins à ces mêmes classes moyennes. Maintenant, en fait il n'y a rien de normal du tout dans la vie, choyée et privilégiée des classes moyennes d'aujourd'hui ; des fraises en plein hiver aux vacances sous les tropiques, ces vies sont pleines de l'extravagance la plus absurde. Seule une civilisation qui surfe sur le tsunami de l'énergie pas chère telle que celle obtenue à partir de combustibles fossiles pourrait se convaincre que de telles habitudes ne le sont pas. Pourtant, ceux qui ont accès à de telles choses ne veulent, de manière prévisible, pas les lâcher et, insister sur le fait que c'est le travail de quelqu'un d'autre de trouver un moyen de garder garder ces choses, est une façon d'exprimer cette réticence, au moins pour le moment.
L'inconvénient de dépendre de quelqu'un d'autre pour faire ça, ou n'importe quel autre travail, bien sûr, est que la dépendance a toujours un coût politique. Dune de Frank Herbert, le classique roman de SF a un personnage qui explique cela à un autre avec une précision digne d'éloges: «Une fois, les hommes ont tournes leur pensée vers les machines dans l'espoir que cela les rendrait libre. Mais cela a justement permis a d'autres hommes avec des machines de les asservir.». La même dynamique est présente lorsque les gens se permettent de devenir dépendant de machines, pour des raisons qui découlent des observations faites la semaine dernière.